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La gavotte, une danse phare

La Nuit de la gavotte à Poullaouen, rendez-vous incontournable des fêtes centre bretonnes ©Éric Legret

« La » ou « les » gavottes ?
À la question « C’est quoi la gavotte ? », un chanteur du centre-Bretagne, par ailleurs bien connu pour son habileté au beat-box, avait répondu : « La gavotte ? C’est la vie ! C’est l’amour ! ». Synonyme de convivialité, cette danse emblématique de Bretagne est, à coup sûr, au même titre que le breton par exemple, un élément majeur du patrimoine du Centre-Bretagne. Le nom gavotte est pourtant d’un usage récent. Il n’est apparu en pays de Quimper qu’à la fin du 19e siècle. Jusqu’au milieu du 20e siècle, on parlait plutôt de dañs tro ou dañs a dro (littéralement, « danse qui tourne » ou « danse en rond »). En Centre-Ouest Bretagne, elle est la danse principale en pays Montagne, Dardoup, Fisel et Pourlet. La gavotte est, de toutes les danses de Bretagne, celle dont la sphère de pratique est la plus large. On regroupe désormais sous ce vocable un ensemble de danses différentes, en rond ou en chaîne, en couple ou en cortège selon que l’on est en pays Montagne, en pays de Châteauneuf-du-Faou, en pays Glazig ou en pays Bigouden.

La gavotte, un lien intergénérationnel ©Éric Legret

Une pratique qui a évolué
Jusqu’à l’apparition au milieu des années 1950 du fest-noz moderne, la pratique comme l’apprentissage par mimétisme des gavottes se limitaient essentiellement aux événements liés à la vie de la société rurale et paysanne : travaux de la ferme, mariages, fêtes calendaires, pardons. La force du revival des années 1960-1970 et le boom des festoù-noz ont bouleversé le paysage de la musique et de la danse. La sphère de pratique des gavottes est aujourd’hui bien plus large que leur territoire local d’origine. La gavotte est enseignée dans tous les cours et les stages de danses traditionnelles qui se tiennent en Centre-Ouest Bretagne. Elle est également enseignée dans les écoles de musique du territoire. Cette évolution a considérablement modifié la sociologie des amateurs de gavottes. Elle est devenue commune aux urbains et aux ruraux, aux jeunes et aux anciens.
Son lieu privilégié d’expression reste évidemment le fest-noz, inscrit depuis 2012 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco. L’inventaire du patrimoine culturel immatériel en Centre-Ouest-Bretagne mené par Bretagne Culture Diversité nous apprend que ce sont en moyenne 100 fest-noz par an qui sont organisés en pays COB, sur plus de 90% des communes du territoire. Elle est incontournable des grands événements que sont la Nuit de la Gavotte, le Printemps de Châteauneuf-du-Faou ou encore le festival Fisel.

La gavotte for ever and ever ?
Peut-on, pour autant, dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Plusieurs points de vigilance sont à prendre en compte. Comme les chiffres de l’Office de la langue bretonne le soulignent, le déclin du breton populaire est une réalité, y compris en Kreiz Breizh. Les jeunes générations sont donc plus difficilement en contact avec la langue bretonne, rendant parfois plus complexe l’apprentissage du kan-ha-diskan, accompagnement premier de la gavotte en Centre-Bretagne. Un second point d’attention est évidemment l’avenir des festoù-noz en Centre-Ouest Bretagne. Plusieurs facteurs sont à prendre en compte ici : la baisse de fréquentation, la vitalité du tissu associatif qui reste fragile, le problème du bénévolat et l’économie des festoù-noz.

Il n’en demeure pas moins que les acteurs culturels du territoire travaillent à ce que l’on pourrait appeler « l’image de marque » de la gavotte. Au premier rang, l’association Dañs Tro de Poullaouen, par exemple, dont l’objet même est de valoriser et promouvoir la gavotte. Ses initiatives originales en temps de COVID-19, comme la livraison de gavottes à domicile. Au cours d’un live facebook, le public a en effet pu solliciter la venue chez eux, de chanteurs ou sonneurs, pour leur interpréter une gavotte à domicile, le tout dans le strict respect des consignes sanitaires. On le voit donc, les défis existent mais l’énergie et les idées pour y faire face aussi.

Christian Rivoalen
Animateur coordinateur à Bretagne Culture Diversité

Article paru dans Le Poher
Semaine du 24 février au 02 mars 2021

En Centre-Bretagne, quand on n'a pas envie d'aller à un rendez-vous, on peut toujours prétexter qu'on a aquagavotte... ©Éric Legret

Trois questions à Yann Le Boulanger, président de Dañs Tro

Pouvez-vous nous présenter Dañs Tro ?
L’association est née en 1989, avec une équipe de sonneurs, chanteurs de Poullaouen, autour de Louis Lofficial, pour organiser un fest-noz un peu particulier : douze heures de gavottes non-stop. Au bout de trois-quatre ans, la formule est devenue la Nuit de la gavotte. En 1994, une nouvelle équipe est arrivée et je suis devenu président. Mais l’objectif était le même : sensibiliser un large public à la gavotte. Nos activités se sont diversifiées au cours des années pour devenir ce qu’elles sont aujourd’hui : la fête du chant et un concert en partenariat avec Le Plancher, l’Entre-deux-fest entre Noël et le nouvel an et, bien-sûr, la Nuit de la Gavotte le troisième week-end de septembre. 

Comment voyez-vous votre action « au service » de la gavotte ?
À travers les manifestations que nous mettons en place, nous essayons d’être fidèles à notre leitmotiv, à savoir, organiser des événements de qualité et conserver un caractère convivial. Nous apportons un soin particulier à notre programmation, en nous laissant guider par une curiosité culturelle, une envie de donner à entendre une diversité de musiques et d’expressions chantées.

Cela passe par des initiatives originales ?
Oui, absolument ! C’est ça conjuguer qualité et convivialité ! Créer notre propre calendrier avec le nouvel an gavotte le troisième dimanche de septembre ou danser la gavotte dans une piscine avec l’Aquagavotte grâce à la complicité et l’aide de Patrick Lancien, responsable de la piscine de Carhaix ! Cette année, confinement oblige, nous avons dû nous creuser la tête. Hors de question de priver les gens de gavottes, d’où la livraison de gavottes à domicile en lieu et place de la Nuit de la gavotte. Pour la fin de l’année, pas d’Entre-deux-fest. Qu’à cela ne tienne ; nous avons mis en place un calendrier de l’Avent gavotte numérique : chaque jour une gavotte à découvrir sur Instagram et Facebook.

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