#

Gallo

#

Gallo

« La diversité linguistique est essentielle pour les humains. La conserver, c’est faire mémoire d’une organisation sociale, d'un rapport au monde, à la nature. C’est se donner une chance de survivre d’un point de vue culturel face aux défis à venir. Face au système économique globalisé, par la langue il s’agit de recréer du local et contribuer à développer des réseaux sociaux de proximité. »

Bèrtran Ôbrée

directeur de Chubri

MISSIONS

Au centre aquatique du coglais Coglé’O, le public sait désormais que Lé qmodité dé foum désigne les toilettes pour femmes et que Ravigotri est l’espace forme. Une signalétique bilingue à l’intérieur de la piscine communautaire de Saint-Brice-en-Coglès qui tout en respectant le gallo tel qu’il est parlé localement, s’inscrit dans un quotidien contemporain. Cette réalisation exemplaire a été mise en œuvre par la communauté de communes du Coglais avec la collaboration de Chubri. L’institut d’inventaire et d’actualisation du gallo contribue à sensibiliser les collectivités locales au pluralisme culturel et linguistique, en les accompagnant à mieux intégrer le gallo dans les politiques publiques. « Nous sommes dans l’ingénierie linguistique pour mettre en œuvre des outils de base qui permettent d’utiliser le gallo aujourd’hui », explique Bèrtran Ôbrée, directeur de l’institut Chubri.

Codification orthographique dans toute sa diversité dialectale et géographique, recherche de terminologies adaptées à chaque projet et service de traduction… l’actualisation de la langue gallèse et son développement sont au cœur des actions menées par Chubri. Les demandes de traduction sont croissantes, explique le directeur, que ce soit de la part des institutions et des associations locales et régionales, mais aussi des médias, des producteurs du secteur audiovisuel, voire des entreprises de l’alimentation et du tourisme : « Ce sont des professionnels qui ont besoin de terminologies modernes avec un vocabulaire que nous forgeons en interne ». Citons par exemple la contribution à la réalisation d’un glossaire de quelque trois cents mots ayant trait à la vie institutionnelle pour les besoins de communication de la Région Bretagne qui reconnaît le gallo comme langue de Bretagne, depuis 2004. « Par exemple, pour les transports, nous proposons le mot chârayment, un néologisme créé à partir du verbe chârayë, transporter et du suffixe ment, la façon de », explique Bèrtran Ôbrée.

Les demandes viennent aussi des néo-locuteurs apprenants, des autodidactes à la recherche d’outils complémentaires, en réponse à des questions de grammaire telle que l’utilisation du passé composé et du passé simple ou de simples problèmes de prononciation. « Nous avons aussi des néophytes qui souhaitent une traduction ponctuelle par exemple pour fêter un joyeux anniversaire », explique le directeur. Avec la mise en ligne prochaine de son nouveau site Internet, l’association se veut didactique et pédagogique pour rendre accessible au plus grand nombre ses fiches linguistiques et grammaticales bilingues ou encore son dictionnaire des prénoms et des noms de communes ou de lieux-dits de Haute-Bretagne.

Ce travail de vulgarisation et de revitalisation du gallo s’appuie sur une connaissance fine de la langue : un inventaire linguistique mené au travers d’enquêtes orales enregistrées et renseignées, avec un dépouillement lexicographique et onomastique précis doublé de la réalisation de fiches d’attestations, plus de 66 000 en 2016. Celles-ci font état de la présence d’un nom propre ou commun à tel ou tel endroit d’un document.
Cette documentation fouillée et analysée de façon méthodologique par Chubri permet d’étayer des outils fiables destinés à l’usage public d’une langue vernaculaire qui connaît, aujourd’hui, un mouvement de réhabilitation et de reconnaissance croissant et décomplexé.

 

Christine Barbedet – avril 2016