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Ethnoécologie

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Savoir relatif à la flore

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Savoir relatif aux médecines traditionnelles

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Ethnoécologie

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Savoir relatif à la flore

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Savoir relatif aux médecines traditionnelles

« L’enquête ethnobotanique prend sa source dans l’érudition buissonnière. Parler de la nature, par effet miroir c’est parler de la société. »

Laurent le Gall

ethnoécologue et ethnobotaniste

MISSIONS

« Le dialogue entre la société bretonne et la flore a permis d’élaborer des savoirs diversifiés, jusqu’à un passé récent. La mise à distance de la nature par nos cultures occidentales s’accompagne d’une érosion simultanée de la biodiversité et des savoirs populaires sur les plantes », commente Laurent Gall, spécialiste en ethnobotanique et ethnoécologie. Ce dernier mène un travail d’interprétation, en questionnant le lien entre les populations locales et le végétal par l’usage et la perception qu’elles en ont.

C’est à la faveur de la rencontre avec un ethnopharmacologue en Amérique latine que Laurent Gall, ethnoécologue, fait alliance avec l’ethnobotanique, en choisissant un retour au pays comme terrain d’étude. Depuis, entre le nord, le sud, l’est et l’ouest de la Bretagne,
Laurent Gall met en mouvement « une machine à remonter le temps », avant la mutation de la société rurale. Une transformation multifactorielle débutée dès la guerre 14-18, marquée par l’arrivée du tracteur et du rotovateur, sans oublier l’implantation de la clôture électrique. Tout un symbole, c’est le nom de garçon-vacher en breton, paotr-saout, qui lui a été donné : « Celle-ci a sonné le glas des savoirs sur la nature que le jeune pâtre expérimentait en gardant les vaches dans les champs », commente l’ethnobotaniste.

En étudiant les catégories sémantiques des modes de classification des sols, des parcelles, des landes, des bois, des friches… l’ethnobotaniste peut penser l’organisation du monde vivant dans une société donnée et, par ricochets, comprendre comment s’organise la société elle-même, comme sur les contreforts granitiques du pays Fañch où il réside : « En breton local, Fagn signifie la crasse, Fagnous, le feignant, et Fagnach, la friche. » Une même structure sémantique désigne une terre non cultivée et une personne improductive : « Ce qui montre que la paresse et le travail sont antinomiques et que le feignant peut mettre en jeu un équilibre social. À nature ordonnée, société ordonnée ! », conclut l’ethnobotaniste.

Autant d’informations que Laurent Gall dit non sans humour « chercher au fonds des orties ». C’est un travail de confiance qui doit s’établir avec les porteurs de savoirs, souvent peu conscients de les détenir. « Je suis issu du milieu paysan de deuxième génération, natif de la commune où je réside. Mon grand-père était l’un des rares habitants de notre village, porteur de cette tradition orale ».
Une clef d’entrée pour l’ethnobotaniste qui noue des liens de confiance avec une dizaine d’informateurs. « Les recherches que je mène, ne seraient pas possibles si je ne parlais pas un breton vernaculaire avec mes interlocuteurs. Le recours à la langue première du locuteur détermine la possibilité d’entendre un propos sur la flore qui traduit sa pensée et ses représentations ».

L’objectif n’est pas de réhabiliter dans leur intégralité des savoirs dont le contexte social a disparu, commente Laurent Gall : « Il s’agit d’essayer de les inventorier, de cerner la diversité qui les constitue et d’effectuer une interprétation ethnologique dans une perspective d’ouverture à la pluralité de ces savoirs naturalistes populaires ». Des connaissances que l’ethnobotaniste souhaite restituer à la population qui les a produites et transmettre aux générations suivantes. Une façon de sensibiliser les habitant.e.s aux usages oubliés de la flore : « Le fait de renommer les plantes permet d’apprendre à les respecter. Changer le rapport à la nature faire évoluer les représentations ».
Herborescence est un outil associatif qui chemine au cœur de cette relation nature-culture, croisant les approches naturaliste, sociologique et artistique. L’association propose des activités culturelles en rapport avec le milieu naturel où s’invite la danse aérienne portée par Élise Trocheris, circassienne. Sur le terrain, à la présentation de plantes et de leur milieu succèdent des temps musicaux et chorégraphiques : « C’est une balade qui se veut une ode à la biodiversité », souligne Laurent Le Gall.

Christine Barbedet – avril 2016