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Gallo

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« Nous devons continuer les collectages de mémoire, continuer de former et transmettre, en valorisant toutes ces expressions de tradition orale, pour préparer la relève. »

Bernard Hommerie

co-président de La Bouèze

MISSIONS

« Depuis plus de trente ans, La Bouèze œuvre pour la conservation et la revitalisation de la culture populaire en Haute-Bretagne. L’association est porteuse d’une belle image », commente Bernard Hommerie, co-président de la structure. Redonner un nouvel élan au projet associatif alors que La Bouèze traversait une période difficile, s’est imposé à celui qui contribuait à son lancement, au cours des années 80. À cette époque, les campagnes du nord de l’Ille-et-Vilaine comptaient encore de nombreux sonnous d’bouèze ou d’accordéon. En 1979, Yves Defrance, professeur de musique à Saint-Malo collectait les derniers violoneux. Il créait l’association la Bouèze avec Daniel Thénadey et Michel Meunier. De son côté, Pierrick Cordonnier qui collectait les sonnous du pays d’Aubigné, rencontrait Bernard Hommerie, président du club de jeunes de Saint-Brice-en-Coglès. Ensemble, ils lançaient la première Assemblée des bouézous, le 30 mai 1980, avec la venue d’une trentaine de sonnous de violon et d’accordéon. Un événement largement relayé par la presse locale qui contribua au succès de l’événement.

Le mouvement des Bouézous est lancé, fédéré par La Bouèze qui chaque année organise son assemblée dans une commune du nord du département, entraînant dans son sillage de jeunes recrues, tels Jean-Luc Revault et Vincent Morel qui joueront ensuite un rôle moteur dans l’association. « En 1983, nous avons décidé d’investir la Maison de la culture de Rennes pour organiser nos premières Rigodailles. C’était extraordinaire de voir les anciens comme les acteurs du renouveau de cette culture populaire et rurale, chantous, sonnous, contous et danseurs, investir un tel lieu ». Pendant six ans, ce rassemblement annuel se poursuit, jusqu’au changement de direction à la tête de la Maison de la Culture.
Pour autant, la Bouèze, passeur de traditions, continue de s’imposer dans les bals bretons et les festoù-noz, avec un autre style dansé, sonné à l’accordéon et « rouziné » au violon. Le public s’approprie le répertoire du pays gallo, les avant-deux et les polkas.

« Au début des années 90. La Bouèze a eu l’idée de créer des cours. Il nous semblait important de donner des revenus fixes aux musiciens tout en formant la relève », commente Bernard Hommerie. Premier permanent recruté, Patrick Bardoul développe une pédagogie spécifique pour enseigner par l’oralité cette musique traditionnelle de Haute-Bretagne. Aujourd’hui, cette transmission reste au cœur des missions de l’association qui dispense des cours d’accordéon, de violon, de clarinette, de harpe, de vielle à roue, de cornemuse du centre et de chant, dans plus d’une trentaine de communes. Une façon d’irriguer le territoire rural avec le patrimoine qui en est issu.

« Collecter est nécessaire et nous continuons à sensibiliser nos élèves, mais sans diffusion cela perd son sens. Notre volonté est que cette transmission permette aux élèves de devenir acteurs et animateurs de ces expressions traditionnelles, dans toutes les communes de Haute-Bretagne, car l’ADN de La Bouèze est rurale », affirme Bernard Hommerie.
Par exemple, des ateliers multi-instruments incitent les participants à se retrouver pour jouer et se produire à l’occasion des veillées musicales ou encore à l’occasion des bals des élèves animés sur le territoire de Haute-Bretagne.
Par ailleurs, La Bouèze développe des ateliers d’initiation à l’art de conter. Les ateliers « Graines de conteurs » sont animés par le conteur Jean-Pierre Mathias, en partenariat avec l’association Graines de conte.

« Notre richesse est aussi notre difficulté, à savoir notre rayonnement territorial. » La force de l’association est pour chaque projet, atelier, stage ou animation, de prendre appui dans les communes sur des partenaires associatifs qui seront autant de relais. « Nous apportons l’organisation, la programmation, la mobilisation et les structures et associations de la commune, apportent la logistique », explique Bernard Hommerie.
« En 2014, nous avons décidé de renouer avec les assemblées. Nous avons organisé la première édition de la Fête de la Bouèze avec la commune de Saint-Christophe-de-Valains, et en 2015, la deuxième édition avec la commune de Montautour. Quelque 300 musiciens et plus de 4000 participants étaient présents. Un beau succès qui montre qu’il y a du potentiel et des attentes », commente Bernard Hommerie.

La Bouèze participe à faire vivre la culture gallèse, en prenant part à nombre d’événements. Citons Sevenadur, la Semaine du Gallo… L’association est aussi partenaire du Kan ar Bobl, pour les rencontres de pays. Depuis plus de quinze ans, la Bouèze intervient dans les écoles pour sensibiliser les enfants au patrimoine oral du pays gallo.
Par ailleurs, avec différents partenaires, La Bouèze participe à l’édition de cartes postales, d’ouvrages, la production de films de collectage, comme celui consacré à Jean Chapdelaine sur le travail traditionnel du chanvre, à Sougéal. Avec l’association Bertègn Galèzz, La Bouèze met en œuvre un centre de documentation dédié à la culture gallèse.

Sans détour, Bernard Hommerie affirme : « Nous faisons des miracles avec vraiment peu de moyens ». Il explique avoir le sentiment que la culture gallèse est dans une vague descendante, mais il se montre optimiste : « Il y aura de nouveau un rebond. Il est donc urgent de le préparer avec des gens qui apprennent la musique et le conte en compagnie de gens de qualité qui se nourrissent de la tradition orale ». Il souligne aussi les difficultés rencontrées par les musiciens traditionnels pour trouver des lieux et se produire en public. Une meilleure visibilité, affirme le co-président, susciterait de nouvelles vocations : « Que ce soit dans les cafés-concerts mis à mal par les nouvelles règles juridiques ou sur les scènes conventionnées, leur présence fait cruellement défaut. C’est simplement un boulanger qui ne peut pas travailler dans sa boulangerie ! ».

Christine Barbedet – avril 2016