Je suis délaissée sans amant

Eugénie Duval, Je suis délaissée sans amant, 1989


— Je suis délaissée sans amant,
Jeune fillette de 20 ans.
Mon amant est parti en Flandres
Pour y rejoindre son régiment,
Et moi qui suis là pour l’attendre,
J’y endure les mille tourments.


Au bout de six ans tout au plus,
Le bel amant est revenu,
Trois p’tits coups, frappe à la porte :
— Où est la belle que mon cœur aime tant ?
Il demande à la voir seule
Et à lui parler seulement.


— Celle que votre cœur aime tant,
Elle est partie dans un couvent,
Dans un couvent des Iles de France
Où elle n’y vit qu’en languissant.
— J’y cours et je vais la rejoindre
Et lui parlerai seulement.


— Mon beau galant retirez-vous
Ici on n’y parle point d’amour.
Cessez vos pleurs, séchez vos larmes,
Elle est enfermée dans ce couvent.
C’est la plus jeune et la plus belle
Des religieuses du couvent.


— Madame ayez pitié de moi,
Je viens du service du roi.
Puisqu’elle y est faut qu’elle y soit,
Puisqu’elle est soumise à vos lois,
Mais auparavant que je meure,
Faites-moi la voir une dernière fois.


Le bel amant fondant en pleurs,
On fit venir la jeune sœur.
Baissant les yeux versant des larmes :
— C’est vous monsieur qu’en êtes l’auteur.
— La belle donnez-moi votre doigt,
Que je vous y marque ma foi,
Car jamais je n’aimerai tant d’autres,
La belle rappelez-vous de moi.


Et en glissant cet anneau d’or,
Le beau jeune homme est tombé mort.
Quelle tristesse pour cette jeune fille,
Toutes les sœurs ont pleuré son sort.
On a reconnu la tendresse
Du jeune amant après sa mort.


C’est mon amant, c’est mon ami,
C’est moi qui vais l’ensevelir :
— Que l’on m’apporte un drap, des roses,
Que je le remplisse de fleurs.
Au même instant il se relève
Et enleva la jeune sœur

Dastum
29 bis rue de la Donelière
35000 Rennes
Site internet