Le déroulement d’une campagne pour la traite atlantique

Autrice : Krystel Gualdé / janvier 2024

Où qu’elle soit organisée et quel que soit son périple, une campagne de traite atlantique n’est pas, tant s’en faut, une expédition comme une autre. Pour les victimes de ce trafic, elle est le moment de l’arrachement, de la dépossession de soi et de la déshumanisation, dans une violence poussée à l’extrême. Pour les armateurs, qui en attendent beaucoup, elle est une opération commerciale sur laquelle ils misent « gros », nécessitant une longue préparation et un investissement lourd.

Acquis en janvier 1769 par Jacques Barthélémy Gruel, un colon domingois venu tenter à Nantes sa chance dans le domaine négrier, le navire la Marie-Séraphique quitte le port le 1er mai de la même année à destination de Loango. L’ambition de l’armateur est grande et ses consignes au capitaine Jean-Baptiste Fautrel-Gaugy sont claires : il faut acquérir et transporter le plus de captifs possible. Leur nombre ne cessera d’augmenter au fil des campagnes. Pour la première, les marchandises embarquées composent un ensemble de plus de douze mille pièces.

Les navires négriers n’ont pas de caractéristique propre du point de vue de la navigabilité. Ce qui les distingue réside notamment dans la présence d’une séparation sur le pont entre une partie accessible aux captifs et une autre entièrement réservée à l’équipage, qui peut s’y retrancher en cas de révolte. L’entrepont, quant à lui, comme les cales, doit supporter des aménagements différents en fonction des étapes de la campagne. La présence de charpentiers à bord est donc, encore plus que de coutume, absolument nécessaire.

L’entassement des captifs dans l’entrepont de La Marie-Séraphique. René Lhermitte, 1770. ©Château des ducs de Bretagne-Musée d’histoire de Nantes.

Pour les hommes, les femmes et les enfants parqués dans l’entrepont, l’arrivée dans la colonie est le moment où s’achève le basculement entamé en Afrique, entre leur condition d’individu libre et celle de personne mise en esclavage, appartenant désormais non plus à l’armateur du navire, mais à un propriétaire que les documents nomment « maître » ou « maîtresse » et pour lequel ou laquelle il faudra dorénavant travailler.

CITER CET ARTICLE

Autrice : Krystel Gualdé, « Le déroulement d’une campagne pour la traite atlantique », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 15/01/2024.

Permalien: https://www.bcd.bzh/becedia/fr/le-deroulement-d-une-campagne-pour-la-traite-atlantique

Proposé par : Bretagne Culture Diversité