Gens de guerre étrangers en Bretagne à la fin du Moyen Âge

Auteur : Laurence Moal / octobre 2022

Il faut distinguer trois groupes : les soldats étrangers incorporés dans l’armée bretonne, ceux qui servent dans un contingent étranger, au terme d’une alliance avec un autre pays, et ceux qui entrent en Bretagne lors d’une invasion et s’y maintiennent comme occupants. Ces mercenaires, la plupart du temps de basse extraction, obéissent à leur propre chef, avant tout en échange d’une solde.

Des compétences recherchées

La plupart des États, n’ayant pas les moyens d’entretenir une armée permanente, y ont recours pour compléter leurs effectifs. Durant la guerre d’indépendance, entre 1487 et 1491, le duché est parcouru à la fois par des gens de guerre alliés et des soldats de l’armée royale. Parallèlement aux capitaines et mercenaires engagés par contrat avec leurs compagnies, certains étrangers sont recrutés individuellement en raison d’une qualification professionnelle particulière : il s’agit de soldats professionnels ou des techniciens hautement qualifiés, souvent itinérants. Les combattants spécialisés, comme les arbalétriers et les archers, souvent provenant d’Angleterre, sont particulièrement recherchés. Le développement d’une artillerie à poudre de plus en plus élaborée détermine aussi la constitution d’un personnel qualifié : artilleurs, fondeurs d’artillerie ou canonniers, souvent originaires de Flandre ou de l’Empire germanique, reconnaissables à leur nom ou surnom : Pierre d’Allemaigne, Allardin de l’Escluze, Jehan de Brucelles, Hance de Neurembert… Les Bretons profitent ainsi des renforts anglais, castillans, flamands et allemands. Mais cette présence est à double tranchant.

Un accueil mitigé

L’accueil qui leur est réservé montre qu’ils sont les bienvenus dans un premier temps, mais la joie laisse bien souvent la place aux difficultés financières. Ainsi, à leur arrivée à Rennes en juin 1488, les troupes d’Édouard Woodville reçoivent, à Rennes, « deux pippes de vin, l’une de blanc, l’autre de claret ». La ville est tenue de les nourrir et de les loger. Après la défaite de Saint-Aubin-du-Cormier (28 juillet 1488), elle doit continuer d’entretenir des soldats anglais déroutés qui, ayant tout perdu, demandent à rentrer chez eux. Par ailleurs, le paiement de la solde des gens de guerre étrangers revient très cher au duché. La guerre contre la France est particulièrement ruineuse entre 1487 et 1491. Les comptes indiquent des dépenses concernant l’artillerie et les maîtres-canonniers, dont plusieurs sont hollandais, flamands et allemands. Les tarifs avantagent sensiblement le personnel étranger, mieux et plus régulièrement payé. Les Allemands, surtout, se montrent exigeants vis-à-vis de leurs soldes qui atteignent des sommes exorbitantes. Mais la trésorerie des guerres ne suffit pas pour couvrir ces dépenses, et le pouvoir ducal, au fur et à mesure de la dégradation de la situation, doit recourir à d’autres sources de financement : les villes contribuent à l’effort de guerre ; le pouvoir ducal doit recourir à l’emprunt auprès de bourgeois ; la duchesse Anne elle-même doit se résoudre à vendre une partie de ses bijoux.

CITER CET ARTICLE

Auteur : Laurence Moal, « Gens de guerre étrangers en Bretagne à la fin du Moyen Âge », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 24/10/2022.

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